Les îlots de chaleur urbain et le rôle de la végétation

Depuis plus de 30 ans, le climat évolue avec des vagues de chaleur de plus en plus fréquentes, longues et intenses. Il y a eu 4 fois plus de jours de canicule cette dernière décennie que dans les années 1980, où il y avait environ 3 jours de canicule en moyenne par an, le chiffre est désormais à 12. Ces phénomènes climatiques extrêmes devraient doubler et s’intensifier d’ici 2050 : les vagues de chaleur pourront s’étendre en commençant dès le mois de mai pour se terminer en octobre. Le changement climatique, combiné à la croissance démographique et à l’urbanisation, exacerbe le phénomène des îlots de chaleur urbains (ICU).

Ville d’Annecy © Pxhere

Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain ? 

Un îlot de chaleur urbain (ICU) se caractérise par des températures de l’air plus élevées dans les centres-villes par rapport aux zones périphériques. Cette élévation des températures persiste souvent durant la nuit. Le phénomène est amplifié par la morphologie urbaine, les matériaux de construction et les activités humaines.

Fonctionnement d’un Îlot de Chaleur Urbain

Le soleil émet de l’énergie vers la Terre. Une partie de cette énergie est réfléchie dans l’atmosphère, tandis que l’autre partie chauffe l’atmosphère et la surface terrestre.

Mécanisme de l’effet de l’îlot de chaleur urbain © Wikimedia Commons

En ville, l’énergie solaire est absorbée et réfléchie par les bâtiments et les surfaces urbaines ce qui augmente la température de surface. Cette augmentation dépend de nombreux paramètres dont la couleur et la matière de la surface éclairée par les rayons lumineux. Les surfaces de couleur claire réfléchissent la lumière ce qui permet d’accumuler moins vite la chaleur que les surfaces sombres. Les matériaux de construction, comme l’asphalte et le béton, absorbent la chaleur et la réémettent, sous forme d’infrarouge la nuit, contribuant à l’élévation des températures. 

Les surfaces multiples de la ville augmentent les zones de renvoi de l’énergie. Ainsi, l’énergie lumineuse absorbée par un bâtiment peut être réfléchie sur un autre bâtiment, qui à son tour absorbe et réémet une partie de cette énergie. Ce processus crée un effet cumulatif de chaleur. 

Les bâtiments réduisent la vitesse du vent, et les nombreuses différences de chaleur en ville contribuent à l’apparition de vents faibles qui sont dirigés des zones froides vers les zones chaudes. Ce sont ces vents qui font apparaître un dôme de chaleur en altitude qui se forme, contribuant à emprisonner davantage la chaleur au sein de la ville.

© WIkimedia Commons

Au-dessus des villes, la température peut atteindre jusqu’à 13°C de plus qu’en milieu rural !

L’influence des facteurs humains 

À la chaleur naturelle s’ajoute la chaleur produite par les activités humaines, telles que les transports, l’industrie, le chauffage et la climatisation. Dans une même ville, selon la saison, on peut observer une différence de température entre ville et campagne de 4 à 5°C, en moyenne. La différence de température peut même atteindre 10°C, la nuit. 

Ce réchauffement local a des conséquences notables : réduction du nombre de jours de gel, diminution de la couverture neigeuse, baisse de l’humidité relative de l’air. Ces changements affectent non seulement le confort des habitants mais aussi la biodiversité urbaine et les systèmes écologiques.

Les solutions pour atténuer les Îlots de Chaleur Urbain

Face à l’augmentation des températures en milieu urbain, des solutions existent pour atténuer les ICU. La nature joue un rôle essentiel et doit être intégrée dès la conception des projets d’aménagement via l’ingénierie écologique, qui vise à gérer, préserver et développer les écosystèmes. Les éléments naturels tels que l’eau, la végétation et le vent sont des solutions efficaces pour réduire les ICU. 

Les solutions vertes 

La solution la plus prometteuse pour lutter contre les îlots de chaleur urbains est de conserver et d’aménager plus d’espaces végétalisés en ville

Choisir des espèces végétales adaptées aux conditions urbaines est essentiel. Les arbres rendent de nombreux services écosystémiques qui sont indispensables pour maintenir l’équilibre écologique et améliorer la qualité de vie. Ils jouent un rôle crucial par l’ombre qu’ils fournissent et par l’évapotranspiration, un processus par lequel l’eau absorbée par les racines est évaporée par les feuilles, contribuant ainsi à rafraîchir l’air ambiant. Les feuilles et les branches des arbres réduisent la quantité de rayonnement solaire atteignant le sol, absorbant jusqu’à 70 à 90% du rayonnement, selon l’essence d’arbre. Ce mécanisme permet d’abaisser significativement les températures. Par exemple, les rues bordées d’arbres anciens peuvent être de 2°C à 3°C plus fraîches que les zones dépourvues de végétation. 

© Wikimedia Commons

L’outil SÉSAME, développé par le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) aide à bien identifier les essences végétales adaptées pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique en ajoutant de la nature en ville. Pour en savoir plus sur le projet, cliquez ici

Parc de Bercy, Paris © Alain Kubacsi / Biosphoto

Les espèces qui sont à privilégier sont les espèces indigène qui permettent de préserver et d’accueillir la biodiversité locale. Par exemple, le lierre, autrefois mal perçu car considéré nuisible pour les arbres, s’avère en réalité inoffensif. Il utilise l’arbre comme support, sans l’endommager. Il offre une nourriture abondante et de qualité, ainsi qu’une multitude d’abris pour de nombreux animaux. Le lichen qui pousse également sur les arbres est un indicateur écologique important, notamment de la qualité de l’air. Il fournit un habitat et une source de nourriture pour divers petits animaux et insectes.

Les solutions bleues 

Les solutions bleues, telles que la préservation des plans d’eau, jouent un rôle crucial dans la réduction des températures urbaines et la création de microclimats plus frais. 

L’évaporation de l’eau absorbe une quantité significative de chaleur, ce qui crée des zones de fraîcheur au sein de la ville. Ce processus naturel aide à abaisser les températures environnantes. La température de surface peut être réduite de 10°C grâce à l’évapotranspiration et celle de l’air local de 2 à 4°C. 

L’eau, qui s’écoule vers les égouts, peut être utilisée de manière plus efficace pour permettre d’irriguer les plantes. Les systèmes de récupération et de gestion des eaux pluviales permettent de maximiser l’utilisation de cette ressource précieuse. 

Les plans d’eau et les végétaux jouent un rôle important dans l’assainissement de l’air. Certaines espèces végétales, implantées autour des plans d’eau, agissent comme de véritables filtres à pollution. Ces plantes peuvent absorber les polluants atmosphériques, contribuant ainsi à l’amélioration de la qualité de l’air en milieu urbain.

© Pxhere

Les solutions grises

L’utilisation de matériaux réfléchissants dans la construction, tels que les toits blancs ou les revêtements de façade clairs, peut réduire l’absorption de chaleur. Ces matériaux clairs renvoient une grande partie du rayonnement solaire, limitant ainsi l’échauffement des surfaces. Les matériaux urbains stockent 15 à 30 % plus de chaleur que les zones moins denses pendant la journée, qui est libérée la nuit, amplifiant ainsi le phénomène d’îlots de chaleur urbain. La création de pistes cyclables et de voies de bus permet de réduire les émissions en dioxyde de carbone et autres gaz à effet de serre. Cela améliore également la qualité de l’air par diminution de polluants atmosphériques. Cela contribue également à rafraîchir l’environnement car moins de chaleur est générée par les moteurs des véhicules motorisés.  

Réduire la température au jardin 

Au jardin, la présence d’arbres et la création d’un jardin écologique permettent de contribuer efficacement à l’atténuation des îlots de chaleur urbains. Voici quelques recommandations : 

  • Plantez des espèces adaptées aux variations climatiques pour assurer leur survie et leur épanouissement
  • Ajouter des points d’eau : mare, bassin, étangs, pour créer des microclimats plus frais et favoriser la biodiversité.
  • Choisissez des arbres à feuillage dense, comme l’érable qui offre une grande surface foliaire. Ils maximisent l’ombre et réduisent la température ambiante.
  • Utilisez des plantes grimpantes et, si possible, laissez vos murs être recouverts par des végétaux pour ainsi diminuer l’absorption de chaleur par les surfaces verticales.
  • Utilisez des plantes couvre-sol, telles que le trèfle et les sedums, pour réduire la chaleur absorbée par les surfaces exposées au soleil.
  • Installez des systèmes de récupération d’eau pour collecter et réutiliser l’eau de pluie pour assurer une irrigation durable. 
  • Créer des zones ombragées et fraîches dans le jardin en utilisant des pergolas et des treillages recouverts de végétation.
  • Utilisez des matériaux de couleur claire pour les allées et les terrasses afin de réduire l’absorption de chaleur.

Conclusion

S’adapter à un monde plus chaud est devenu une priorité, particulièrement dans les villes qui combinent population importante et conditions d’exposition aggravées par l’ICU. 

Face à l’intensification des vagues de chaleur et à la densification urbaine, il est crucial d’adopter des stratégies d’aménagement intégrant davantage de végétation et de plans d’eau pour atténuer le phénomène des îlots de chaleur urbains. La végétalisation apparaît comme une solution clé pour améliorer le confort thermique des habitants et la résilience des villes au changement climatique.

© Pxhere

Sources







 

 










 

 

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