« Agroforesterie », le terme vient de la contraction de « agriculture » et « forêt ». Il désigne un modèle de pratiques agricoles qui tire parti des complémentarités entre l’arbre et les cultures. Découvrez comment les agriculteurs, en s’inspirant du fonctionnement biologique des forêts pour la gestion de leurs parcelles peuvent protéger la biodiversité tout en bénéficiant d’avantages agronomiques !
L’agroforesterie consiste à intégrer complètement l’arbre (sous diverses formes que nous verrons plus bas) dans la conduite de l’exploitation et les modes de cultures. En multipliant les strates végétales dans ses parcelles, comme dans les forêts, l’agriculteur y accroit la diversité d’espèces, d’habitats et de fonctions écologiques. La forme la plus connue est la préservation ou l’implantation de haies qui, lorsqu’elles sont suffisamment denses, forment un paysage de bocage. Outre les arbres de haut jet (hêtre, chêne, châtaigner…), elles comportent une strate arbustives (aubépine, sureau, prunellier…). Mais les cultures peuvent aussi bénéficier d’interactions avec les arbres des bosquets ou ripisylves (sur les rives des cours d’eau), voire même d’arbres plantés directement dans les champs formant ce que l’on appelle des « inter-rangs » par exemple dans des vergers-maraîchers.
Les arbres assurent donc eux-mêmes un rôle productif et fournissent des fruits, ou bien du bois d’œuvre ou pour l’énergie, ou encore du fourrage pour le bétail. L’agriculteur y trouve alors un intérêt économique direct puisqu’il diversifie sa production. Les vergers-maraîchers permettent notamment de proposer une offre de fruits et légumes plus variée. C’est aussi un gage de stabilité économique en cas d’aléas climatiques ou de variations des prix du marché ! Au quotidien, les arbres rendent parfois le travail dans les champs moins pénible en offrant de l’ombre. Dans des pré-vergers, le bétail peut également en profiter !
Mais c’est avant tout le fonctionnement écologique et donc la conduite agronomique des cultures qui sont fortement modifiés. Les parcelles agroforestières sont ainsi notamment productives. On compte en moyenne 10 tonnes de biomasse supplémentaires produites par hectare et par an ! En effet, en augmentant la surface foliaire pour une même surface au sol, la capacité de photosynthèse augmente et donc l’utilisation de l’énergie solaire est optimisée. De plus, les pollinisateurs et autres auxiliaires des cultures y trouvent davantage de refuges. Ils améliorent ainsi la qualité et la quantité des récoltes et assurent notamment un rôle de lutte biologique contre les ravageurs. L’agriculteur peut ainsi réduire l’utilisation de produits phytosanitaires !
Un élément essentiel de l’agroforesterie est également la conservation de la bonne santé et de la fertilité des sols. L’Association Française d’Agroforesterie défend ainsi un travail mécanique réduit du sol (au contraire des labours systématiques et profonds) mais confié aux vers de terre pour préserver les champignons mycéliens. Ces champignons vivent en étroite symbiose avec les racines des arbres, sous forme de filaments. Ils leurs permettent d’accroître leur accès à l’eau et aux ressources minérales et participent à la structuration du sol. Ainsi les parcelles agricoles bénéficient d’une meilleure rétention de l’eau, d’une réduction de l’érosion et d’un meilleur recyclage de la matière organique (feuilles mortes et racines). Enfin, dernier élément non négligeable dans certaines régions, les arbres constituent autour d’eux un microclimat. Par un effet brise-vent, l’apport d’ombre, et un maintien de l’humidité de l’air, ils permettent notamment de limiter les besoins en irrigation.
Les bénéfices pour la biodiversité sont évidents et les parcelles agroforestières constituent des éléments structurant des corridors écologiques. Au-delà des auxiliaires de cultures, ronces et lierres, qui croient dans les haies, offrent gite et couvert à de nombreuses espèces : lièvre, lapins, chevreuils, renards, oiseaux frugivores et granivores… Les arbres permettent également de stocker davantage de carbone à travers l’incorporation de matière organique par les racines. En plus d’être plus résilientes au changement climatique par une meilleure capacité d’adaptation (diversité spécifique et génétique), elles participent à son atténuation. Les racines captent par ailleurs le surplus de nitrates non consommés par les cultures, limitant la pollution des eaux souterraines.
Le choix de pratiques agroécologiques n’est néanmoins pas anodin pour l’agriculteur. Elles impliquent des efforts importants de conception des systèmes de culture qui doivent être adaptés à chaque situation : préservation et entretien de l’existant (ex : haies, bosquets) et plantation, choix des espèces, organisation des parcelles, espacements des interrangs, modes de récoltes… L’entretien des arbres demande également une formation et du matériel spécifique.
Comme toujours, l’agroécologie, dont l’agroforesterie constitue un des modèles, ne propose pas de solution toute faite et demande de l’observation, de l’expérimentation, de l’investissement et des prises de risques pour l’agriculteur. Mais pour quels bénéfices !
Professionnels, rejoignez le programme « Prairies de Noé » qui encourage largement la diffusion de l’agroforesterie et le soutien de tous (consommateurs, entreprises agroalimentaires et pouvoirs publics) aux agriculteurs pour leur adoption !