Le frelon à pattes jaunes, communément appelé « frelon asiatique » dans les médias, et plus connu sous le nom charmant de Vespa velutina chez les férus de faunistique et d’entomologie, est une espèce invasive qui suscite de plus en plus d’inquiétudes dans de nombreuses régions du monde. Originaire d’Asie, ce prédateur redoutable s’est propagé rapidement et a un impact significatif sur les écosystèmes locaux et la biodiversité. Dans cet article, nous verrons de plus près les caractéristiques du frelon à pattes jaunes, son mode de vie, ses impacts négatifs et les mesures prises pour le gérer.
Caractéristiques du frelon à pattes jaunes :
Le frelon à pattes jaunes est un insecte de grande taille, avec une reine pouvant mesurer jusqu’à 3 centimètres de longueur. Il se distingue par son corps noir intense et ses pattes jaunes caractéristiques. Le frelon asiatique est un prédateur vorace qui se nourrit principalement d’insectes, notamment d’abeilles. Il construit de grands nids en forme de boule suspendus aux arbres, généralement en hauteur.
Comment les populations de frelons à pattes jaunes se propagent-elles ?
Les premières infestations en France datent de 2004 : ce prédateur invasif des abeilles a été recensé la première fois dans le sud-ouest français non loin de la frontière espagnole. Sa propagation est très rapide : il est capable de parcourir 100 km par an. Il n’existe actuellement aucune méthode efficace pour contrôler cette espèce, qui va probablement coloniser la majeure partie du continent ainsi que d’autres régions du monde.
Comme beaucoup d’insectes sociaux, Vespa Velutina produit plusieurs colonies à partir d’une seule reine après l’hibernation. Seuls les futures reines (qualifiées de « fondatrices ») survivent à la période hivernale. Après l’hibernation, chaque fondatrice fécondée construit un nid primaire. Ainsi, la colonie, initiée par un individu unique, se développe à travers la saison chaude, en produisant jusqu’à plusieurs milliers de travailleurs, avant de décroitre finalement et de mourir à l’automne après l’apparition de la nouvelle génération d’individus. À cette date, la colonie aura élevé des centaines de mâles et de nouveaux fondateurs capables de s’accoupler et de produire ensuite de nouvelles colonies. Ce cycle de vie efficace initié par un seul individu fait des frelons de redoutables envahisseurs.
Lien avec les changements climatiques
Si, depuis son introduction en France, son expansion a été très rapide, celle-ci risque de s’accélérer avec le changement climatique. En effet, étant une espèce exotique avec des préférences de températures relativement élevés, le frelon à pattes jaunes profitera de l’augmentation moyenne des températures pour se propager de façon encore plus importante. L’Union syndicale apicole du Roussillon (Usar) a notamment pu noté que dû au changement climatique, sa zone de prédation a pu s’étendre en moyenne montagne et celle-ci continuera de s’agrandir avec le réchauffement.
Les impacts du frelon asiatique sur la biodiversité
- Une menace pour les abeilles
Les frelons asiatiques sont une menace sérieuse pour l’activité apicole. Vespa velutina est un prédateur des abeilles connu en Asie. En effet, les ouvriers volent près des ruches, attrapent leur proie en volant, atterrissent à proximité pour les transformer en bouillie et les ramènent au nid pour nourrir les larves. Cette prédation peut être intense vers la fin de l’été, lorsque la population ouvrière atteint son maximum alors que la couvée doit être nourrie. Les abeilles jouant un rôle crucial de pollinisateur pour la reproduction des plantes à fleurs, leur diminution peut avoir des conséquences graves sur la production alimentaire et la diversité des plantes.
Les espèces d’abeilles asiatiques sont capables de résister à ces attaques. En s’agglutinant sur leur prédateur, elles augmentent la chaleur de ce dernier qui finira par mourir d’hyperthermie. Un comportement similaire a été observé chez certaines abeilles françaises, mais que très ponctuellement.
- Une menace potentielle pour la biodiversité locale
Le régime alimentaire de Vespa velutina ne se limite pas aux abeilles. Pendant les périodes de haute activité, le frelon attaque intensément divers insectes et araignées, ce qui indique que de nouvelles espèces de proies peuvent être menacées par ce nouveau prédateur.
Il a une réelle préférence pour les hyménoptères sociaux comme les abeilles et les guêpes communes ainsi que d’autres pollinisateurs – tels que les Sylphidés – ou les diptères nécrophages comme les mouches domestiques (Calliphoridae, Muscidae).
Les moyens de lutte
Actuellement, les méthodes de lutte se basent sur la pose de pièges et la destruction des nids. Bien qu’il ait déjà prouvé son efficacité contre les invasions d’insectes sociaux, le piégeage de masse à base de vin blanc, bière, sirop et/ou de miel est connu pour nuire également aux autres espèces locales d’insectes en décimant leurs populations et ne se montre pas très efficace face au frelon à pattes jaunes.
Pour l’instant, et jusqu’à ce que des pièges et des appâts plus sélectifs et efficaces soient rendus disponibles, la seul méthode qui pourrait réduire l’impact de cette espèce sur l’activité apicole est seulement de détruire Vespa Velutina dans ses ruches naturelles pendant les périodes de fortes prédation – procédé dangereux, laborieux et couteux en temps et en ressource, avec une utilisation de pesticides dangereux pour la santé humaine et la biodiversité. Pas de recette miracle donc…
Les scientifiques travaillent à la mise au point de méthodes de piégeage sélectives qui ciblent spécifiquement les frelons asiatiques sans nuire aux autres insectes pollinisateurs en utilisant notamment des phéromones. Des études sur les interactions entre les espèces, les prédateurs naturels du frelon asiatique et les moyens de limiter sa reproduction sont en cours pour élaborer des stratégies de gestion plus efficaces. Des progrès prometteurs ont été faits sur la compréhension de la communication chez les frelons et des méthodes de lutte biologique pourront bientôt apparaître !
Au jardin
Comme son nom français l’indique, Vespa velutina est facilement reconnaissable à ses pattes jaunes, mais surtout à son ensemble abdomen-thorax plus ramassé et de couleur plus sombre que celui de son cousin le frelon européen Vespa crabro.
Peu agressif envers l’homme, son venin est également moins douloureux que celui des frelons européens – même s’il est tout de même déconseillé d’aller s’y frotter de trop près.
Comme indiqué plus haut, il n‘existe pas encore à notre connaissance de bonne pratique en lutte biologique pour empêcher le frelon asiatique de faire des ravages parmi nos pollinisateurs sauvages.
On peut seulement dire que la prolifération de cette espèce témoigne d’une tendance générale qui voit les espèces généralistes s’adapter de plus en plus facilement à différents milieux et habitats, au détriment des espèces locales, souvent spécialisées. Une solution à long terme ? Restaurer au jardin (mais pas uniquement) un équilibre écologique, amenant toujours plus de biodiversité, avec toujours plus d’espaces dédiés aux pollinisateurs sauvages, odonates, petits mammifères, batraciens, et espérer une régulation naturelle de ces prédateurs.